Honnêtement, j'étais parti avec mon appareil photo avec pour objectif d'alimenter mon compte Flickr avec des photos étonnantes et édifiantes d'œuvres installées en ces lieux cent fois arpentés. Il n'était pas pour moi question d'en tirer un quelconque bénéfice wikipédiesque. Et pourtant, le soir venu, un célèbre contributeur octopode est venu m'interpeller sur l'opportunité de créer un article [[Estuaire 2009]], à l'image de [[Estuaire 2007]], créé en son temps. Un rapide coup d'œil m'a permis de me rendre compte qu’il y avait en fait tout un ensemble d'articles regroupés dans la Catégorie:Estuaire 2007 ! Soit. Et évidemment, comme il se doit, chacun des articles est illustré par une photo des dites œuvres. Mon balai commonsien commence à me démanger avant que je ne me pose la question qui vaille : « Et si (certaines de) ces photos étaient malgré tous admissibles ? »
J'entends déjà au fond de la salle des bonnes âmes qui s'émeuvent : « Comment celui qui supprime autant de photos de bâtiments qui ont eu le malheur d'être édifiés par des architectes pas assez morts peut-il soutenir qu'une œuvre, tellement contemporaine qu'elle vient à peine d'être mise en place, puisse avoir son image sur Commons, la médiathèque si libre qu'on a le droit de ne rien y faire ? »
En fait, au vu des œuvres présentées en ce moment dans l'estuaire et sa proche banlieue, on est amené à s'interroger sur la notion même de travail artistique protégeable par le droit d'auteur. On ne peut dénier que l'idée qu'a eue l'artiste et le discours lié présentent une originalité qui caractérise une démarche artistique. Cependant, doit-on considérer que la photo qui en résulte est une œuvre dérivée qui ne peut trouver sa place dans notre médiathèque en ligne ?
Pour y voir plus clair, je vous propose d'examiner le cas de trois œuvres que j'ai vues :
- À Lavau-sur-Loire, 川俣正 (Tadashi Kawamata, pour les non-nippophones) a installé dans les marais un cheminement en bois, semblable à ceux que met en place le Conservatoire du littoral pour protéger dunes et côtes sensibles, qui aboutit sur une tour permettant d'observer le site.
- Dans les douves du château des ducs de Bretagne, Stéphane Thidet a choisi de laisser baguenauder une meute de six loups, des vrais qui bougent et montrent les crocs (photo).
- Enfin, Céleste Boursier-Mougenot a transformé les halles du Bouffay en volière géante où des oiseaux volent à leur guise en se posant sur des Gibson simplement posées sur des trépieds et branchées sur des amplis.
C'est là que l'on sent bien la difficulté de définir un seuil d'originalité, à l'image du Schöpfungshöhe défini par le droit allemand. L'art contemporain est friand de ce genre d'installations qui ne sont pas des créations d'objets artistiques mais vont au-delà en explorant d'autres sens que la seule vue. Ainsi, l'œuvre n° 2 ne peut se comprendre que si on a l'habitude des douves du château et c'est le caractère exceptionnel de la présence de loups en ces lieux qui suscite une émotion artistique, contrairement aux ours du Bärengraben.
À mon avis, dès lors qu'il ne s'agit que d'une reproduction partielle d'un œuvre et que la photo ne rend compte d'aucune recherche esthétique autre que celle du photographe, on devrait considérer que la reproduction de certaines œuvres contemporaines est bel et bien libre.
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